Gestion de la Relation Client en matière de réservation
Notre évasion digitale du 2 février 2021 était consacrée à la Gestion de la Relation Client en matière de réservation, avec l’intervention de Christian Gosseaume, avocat en droit et fiscalité du tourisme.
Elle s’est déroulée en 2 parties :
- Première partie : présentation d’éléments de cadrage sur le contrat de location et sur la gestion des annulations (document de l’avocat en téléchargement ci-dessous)
- Deuxième partie : échange avec l’avocat sous forme de questions-réponses (la Foire Aux Questions ci-dessous est une retranscription écrite de ces échanges pour vous permettre d’accéder rapidement aux éléments de réponse apportés à la question que vous vous posez peut-être aussi !)
Vous pouvez également visionner ou re-visionner l’évasion digitale dans sa globalité.
3 sujets principaux ont été évoqués :
- Le contrat de location : pourquoi est-il indispensable ? quelle forme doit-il avoir ? que doit-il contenir ?
- Annulation de réservation : que prévoit le droit commun hors cas de force majeure ? Qu’en est-il en cas de force majeure ? Comment gérer les reports ?
- Les principales évolutions dans la gestion de la relation client dues à la crise actuelle : quelle conduite adopter face à ses clients ? comment s’adapter à la conjoncture ? comment capter les nouvelles demandes ?
C’est pourquoi nous présentons la Foire Aux Questions suivante par thème.
LE CONTRAT DE LOCATION
En cas de réservation de dernière minute par téléphone, comment faire signer un contrat ? La vente à distance par carte bancaire est-elle valable même si nous ne pouvons pas proposer au client de 3D Secure ?
Dans ce cas, la seule solution est de demander au client de formuler sa demande par mail suite à l’appel. Un contrat écrit reste obligatoire : vous pouvez l’éditer rapidement (une fois votre modèle élaboré, éditer un nouveau contrat peut être rapidement réalisé) puis attendre l’arrivée du client pour signature du contrat sur place avant l’entrée dans les lieux.
Suggestion de l’équipe de l’ADT : avec l’outil Open Pro, vous pouvez enregistrer rapidement une réservation par téléphone, dite « locale », et paramétrer l’envoi automatique du contrat au client par mail.
Si l’hébergeur demande le numéro de carte bancaire du client par téléphone, cela ne peut se faire que sur une base de confiance (il n’est pas certain que le client accepte). L’hébergeur peut aussi proposer au client d’envoyer une copie de son chèque d’acompte (en gage de confiance).
Si toutes les informations relatives au bien loué sont indiquées sur notre site internet, est-ce qu'il faut les noter aussi sur le contrat ?
Les descriptifs de l’hébergement et des services fournis sont très importants et doivent être les plus complets possible. Ces éléments doivent être ajoutés en annexe au contrat même s’ils figurent déjà sur le site web. Dans le souci de proposer un contrat équilibré (les obligations d’une partie ne peuvent pas être démesurément plus importantes que celles de l’autre partie), les informations descriptives, tout comme les condtions générales et particulières de vente, peuvent faire l’objet d’une ou plusieurs annexes au contrat ; chaque annexe faisant partie intégrante du contrat.
Il est conseillé de ne pas négliger non plus l’état des lieux à l’entrée et à la sortie. C’est le loueur qui le fait à la sortie : même si c’est contraignant, il est indispensable de le faire.
Faut-il indiquer dans le contrat de location les documents joints en annexe (exemple : état descriptif, ...) ?
S’il y a des annexes au contrat, il faut les mentionner dans celui-ci. Le contrat doit reprendre de manière précise la prestation en détail. Tous les éléments constituants doivent donc y figurer, qu’ils apparaissent en annexe ou dans le corps du contrat.
Un contrat de location est indispensable, mais il n’y a pas de forme imposée. Certains réseaux ont leurs propres modèles de contrat.
Les annexes doivent telles être datées ? (ex : descriptif en date du..., règlement intérieur valable à compter du..
Il n’y a pas d’obligation légale mais cela est fortement conseillé. Quand vous établissez des modèles de contrat et de document annexe, il faut surveiller régulièrement (idéalement chaque année) qu’il n’y ait pas eu d’évolution des exigences réglementaires entre-temps et faire évoluer vos modèles en conséquence.
Faut-il renouveler le contrat de location si un client réserve aujourd'hui pour août 2021 ? Ou est-ce que le paiement du solde suffit pour confirmer la réservation ?
Pour août 2021, juridiquement, tout est possible. De particulier à particulier, on peut demander un acompte voire même le règlement de la totalité de la prestation lors de la réservation, mais ce n’est pas très rassurant pour le client. Ce sont les conditions d'annulation indiquées dans le contrat qui sont à prendre en compte.
Il faut garder en tête que les conditions d’annulation, tout comme cela a été évoqué précédemment concernant le détail du contrat, doivent être les plus justes et équilibrées possible entre les droits et devoirs du propriétaire et ceux du locataire (au risque que la clause d’annulation soit qualifiée d’abusive au tort du propriétaire).
En cas de réservation en ligne avec validation des conditions générales de vente par le client avant le paiement sécurisé, puis acceptation par écrit de la réservation de la part de l'hébergeur, faut-il envoyer quand même un contrat "papier" par mail ou courrier au client ? Ou cette procédure en ligne a-t-elle une valeur juridique équivalente ?
Conformément aux termes de l'article L324-2 du code du tourisme, le contrat de location d'un meublé de tourisme ou de chambre d'hôtes est obligatoirement écrit, ce qui impose effectivement une procédure quelque peu aberrante en 2021 (!) qui nécessite d'imprimer, de remplir et de signer le contrat avant de pouvoir le renvoyer au loueur, considérant qu'une signature scannée ne dispose d'aucune valeur de preuve juridique en cas de conflit. En effet, la signature doit être la manifestation du consentement du signataire sur le contenu intégral du document, et dans le cas d'un copier/coller d'une signature au format "pdf", il n'est pas possible de prouver qui a apposé cette signature et qu’il s’agit bien de la bonne personne qui a signé le document.
Sauf à digitaliser et/ou numériser le contrat avec la signature manuscrite, l'obligation de l'article précité est parfois, et même souvent, inobservée ... au risque pour le loueur de se voir opposer le contrat non conforme, ou l'absence de contrat en cas de conflit.
Que se passe-t-il si un client réserve aujourd'hui pour un séjour de plus de 90 jours ?
Si un loueur en meublé de tourisme convient d’un séjour d’une durée supérieure à 90 jours, dans ce cas, il sort du régime de la location touristique de courte durée et passe sous le statut de la location permanente, changeant ainsi son régime fiscal et ses conditions générales de location.
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ANNULATION DE RÉSERVATION
Un avoir de 18 mois a été donné dans le cadre de l’ordonnance du 25 mars 2020. Les 18 mois arrivent à échéance. Le client demande de prolonger son avoir de 18 mois supplémentaires. Suis-je obligée en tant que vendeur d'accepter cette demande ? Qu'est-il recommandé de faire ?
Au bout de 18 mois, si le client ne veut pas bénéficier de son avoir, ni de la possibilité de report qui lui a été offerte, le vendeur rembourse les sommes versées et peut mettre un terme au contrat. Il faut cependant mesurer les conséquences de ce choix dans le contexte actuel, d’un point de vue commercial mais également en termes de réputation.
Si un nouveau report est accepté par les 2 parties, il s’agira d’un accord à l’amiable entre le vendeur et le client.
Pour les avoirs faits pendant le 1er confinement, il me semblait que le professionnel devait rembourser les sommes versées si le client ne souhaitait pas utiliser l'avoir pendant les 18 mois.
Oui, au bout de 18 mois, dès lors qu'il n'y a pas eu de nouveau contrat pour un report de séjour, le client peut obtenir un remboursement intégral des sommes versées pour la réservation initiale. Mais le professionnel peut aussi rembourser avant le terme des 18 mois.
Un client étranger qui avait réservé pour un séjour en juin 2020 a dû annuler sa réservation, car les frontières étaient fermées. J’ai fait avoir de 18 mois. Le client fait une nouvelle réservation pour août 2020. La veille, il annule, car il a peur. Aujourd'hui il veut faire une nouvelle réservation pour juin 2021. Et il me réclame son avoir, mais c'est lui qui a annulé en août. Est-ce que le report est toujours valable ?
La peur n’est pas un cas de force majeure, donc le contrat et les conditions générales de vente s’appliquent face à l’annulation par le client hors cas de force majeure pour le séjour du mois d’août 2020. Il est important pour l’hébergeur de conserver une trace écrite de cette demande d’annulation.
S’il y a une nouvelle réservation pour juin 2021, elle doit faire l’objet d’un nouveau contrat avec les conditions d’annulation valables pour ce contrat et tenant compte des éventuelles restrictions de déplacement (ou autre cas de force majeure) qui pourraient s’appliquer en juin 2021 (mais dont on ne connaît forcément pas la nature à ce jour).
Pour les hôtes qui ont réservé et payé via Booking et ont dû annuler leur venue à cause du confinement... que se passe-t-il au bout de 18 mois s'ils n'ont pas réservé de nouveau dans mon établissement ?
Si c’est Booking qui a encaissé les sommes versées, c’est Booking qui est le vendeur et qui est tenu de rembourser le client ou d’éditer un avoir. Le contrat est arrivé à son terme si Booking a remboursé le contrat.
Mais si Booking a remboursé l’hébergeur et non le client, et si le client ne veut pas de report dans les 18 mois, l’hébergeur devra rembourser le client en direct au bout des 18 mois.
Une mesure d'isolement peut-être jurdiquement être considérée comme un cas de force majeure ?
L’isolement imposé pour raison de maladie ou de cas contact identifié n’est juridiquement pas considéré comme un cas de force majeure. Mais les hébergeurs sont de plus en plus conciliants vis-à-vis de ce genre de situations et cela paraît tout à fait opportun. Peut être considérée comme un cas de force majeure toute situation extérieure entrainant l’impossibilité au client de se rendre sur les lieux du séjour. Ex : catastrophe naturelle, fermeture administrative, restriction de déplacements... La maladie n'est pas un cas de force majeure.
Conditions d’annulations : qu’en est-il depuis le 16 septembre 2020 ?
L’ordonnance n°2020-315 n’est plus d’actualité. Les professionnels du tourisme peuvent toujours proposer un avoir à leurs clients dont le séjour est annulé, mais le client est désormais en droit de le refuser et d’exiger un remboursement immédiat pour cause de force majeure.
Si un séjour est maintenu par le professionnel, car estimé réalisable (le cas de force majeure ne peut être invoqué), mais que le client souhaite lui-même l’annuler, ce sont alors les conditions générales de vente du prestataire qui s’appliquent.
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ÉVOLUTIONS DE LA RELATION CLIENT
Quelles bonnes pratiques en termes de réassurance des clients observez-vous depuis quelques mois ?
Certains hébergeurs n’encaissent pas les arrhes ni l’acompte et proposent une annulation sans frais sans même que le motif puisse être considéré comme un cas de force majeure. Il semble important de ne pas imposer d’obligation économique importante au client.
Par rapport à la situation il est important que les hébergeurs instaurent un dialogue avec leurs clients, qu’ils fassent preuve de considération envers leurs clients en leur proposant par exemple de réadapter le contrat (quand c’est possible en fonction de la situation). Même si en matière de trésorerie c’est compliqué à court et moyen terme, cela permet de se donner une chance de garder les clients sur le long terme, ce qui semble indispensable pour l’avenir.
Les hébergeurs, les Offices de Tourisme voient émerger de nouveaux comportements, de nouvelle attentes (réservations de dernière minute, demandes d’offres tout compris ou services de conciergerie, comportements non adaptés à la situation sanitaire…). Comment s’adapter, comment réagir ?
Les réservations de dernière minute sont en effet très fréquentes compte tenu de la situation. Il est important pour un hébergeur de pouvoir les capter. Même 2-3 heures avant l’heure d’arrivée, il devrait être tout à fait possible d’envoyer directement le contrat par mail et de demander un renvoi du contrat signé par le client par retour de mail.
Des clientèles habituées à partir à l'étranger en all inclusive (tout compris) exigent parfois des services qui ne sont pas prévus dans les prestations fournies par l’hébergeur. Il est essentiel de :
- préciser dans le contrat de manière assez détaillée les différents services qui sont prévus dans la prestation ;
- renvoyer vers des prestataires locaux immatriculés sur le registre des opérateurs de voyages et de séjours les demandes de combinaison avec d’autres services de voyages. Toute personne qui vendrait une prestation externe, sans être immatriculée sur ce registre, peut avoir des sanctions pour exercice illégal d’activité non conforme et engager sa responsabilité sans être couverte pour ce type d’activités.
Dans le cas de services de conciergerie ou activités vendus par un une structure immatriculée, ce sont les conditions générales de vente du vendeur qui s’appliquent. Celui qui vend dispose pour autant d’un droit de recours vis-à-vis du prestataire qu’il a fait intervenir pour un client, si le vendeur peut prouver la faute dudit prestataire.
Pour une simple option de réservation, dès lors qu’il n’y a pas de vente (et donc aucun encaissement), ni aucun contrat signé, la responsabilité de la structure qui se charge de prendre l’option ne peut être engagée.
Autres ressources sur ces sujets
L’UNAT a édité une note offrant un focus sur l’utilisation des avoirs édités dans le cadre de l’ordonnance 2020-315.